1871/2021 La Commune toujours debout !
Article mis en ligne le 18 février 2021
dernière modification le 6 mai 2021

par Webmestre

2021 Réinventons La Commune avec Mémoire à Vif et fêtons
Un printemps communeux
A Limoges 22, 29 mai et 12 juin
Passeur d’Histoire, cinéma, Théâtre...et quelques chansons.

La Commune de Paris, c’est la première Révolution dans l’Histoire qui n’est pas celle d’un parti, d’une classe, d’une faction. Révolution sans homme providentiel ni porte-drapeau.
Aussi, restons fidèles à cet esprit de la Commune et fêtons sans mythifier, en partageant, simplement, le temps d’un film ou d’une chanson, le chemin des Communeux qui mène jusqu’à nous.

Arborons l’immortelle rouge, portée à la boutonnière par les Communeux, comme emblème de la République sociale. « Œillet de Belleville » chanté par Louise Michel :
« Parfois on a jeté des fleurs.
De ces rouges œillets que, pour nous reconnaître,
Avait chacun de nous. Renaissez, rouges fleurs,
D’autres vous répandront aux temps qui vont paraître,
Et ceux-là seront les vainqueurs »

Hissons le Drapeau rouge, adopté par la Commune, il est beau quand il flotte dans le vent, mais sachons écouter Jean-Baptiste Clément : « Nous saurions bien nous passer de drapeau si la paix sociale était faite. Bien plus, nous serions heureux de le remplacer par une branche d’olivier »

Rappelons-nous que la Commune a beaucoup voyagé à travers le monde et qu’aujourd’hui, elle est bien vivante au Rojava, au Chiapas, avec les Indignés, les Zadistes, les Gilets Jaunes…Partout où vit l’espoir d’une société ouverte sur tous les possibles.

La Commune ça veut dire :
Beaucoup plus bien plus encore
C’est tout le luxe de la vie
C’est une liste à compléter
Non c’est une liste à refaire
C’est une page blanche

André Benedetto

Programme

Samedi 22 mai EAGR 64 avenue de la Révolution
16h30 : L’écho de la Commune dans l’Histoire
Par Dominique Danthieux, historien.

Samedi 29 mai Théâtre Expression 7 Deux représentations : à 14h30 et à 16h30
« Vivre La Commune ! Demain il fera jaune ! »
Une histoire d’hier et d’aujourd’hui
Mise en espace par Amélie de la Cie Chausse-[Trappe]
Accompagnée par Alain à l’accordéon
Racontée et chantée par Les Fédéré.es du 87 : Alain, Amélie, Francesca, Françoise, Jean-Paul, Sylvie
Et la complicité technique de Franck

12 juin Cinéma Grand Ecran Centre à 14h15
« La Commune » de Peter Watkins
Film présenté par Gérard Mordillat, écrivain/cinéaste

Pourquoi nous aurions préféré chanter la Commune en mars ?

...ce que la pandémie n’a pas permis !

Le début de la Commune, c’est le 28 mars lorsqu’elle est officiellement déclarée. Et c’est la plus belle journée de fête de la Commune donc un jour de grande espérance.
Mai, c’est la terrible répression, l’échec, la fin des espoirs.

Mémoire à Vif aurait préféré célébrer la vie, cette vie que les Communeux ont vécu pleinement. Une manière aussi de montrer qu’elle est toujours debout, vivante.

« Toutes les Communes ont été des réalités, des actes de vie et d’espoir-pour certains des actes de foi- mais il ne faut pas céder à la tentation d’en faire un nouveau mythe. Les communards n’ont pas été à la mort en chantant. Ils ont lutté en chantant et souvent rencontré la mort sur leur route. Ils n’ont pas choisi la mort. Ils ont, au contraire, marché vers la vie. Ils n’ont pas voulu répondre à un appel de l’Histoire, mais vivre pleinement dans une société qu’ils voulaient créer et dont ils entendaient fabriquer et placer tous les rouages. » Hellyette Le monde libertaire mars 1971

Communards ou Communeux ?

Comme le rappelle Bernard Noël, dans son Dictionnaire de La Commune, le terme Communard était très rarement employé à l’époque. A Versailles comme à Paris, on parlait des Communeux, terme qui fut pendant longtemps synonyme d’émeutier, en particulier pour les journalistes et écrivains, et forgé, peut-être, à l’imitation de partageux . Ludivine Bantigny est plus radicale, s’adressant aux Communeux, dans La Commune au présent : "Bien sûr, communards est devenu, si l’on peut dire, commun. Mais, ce n’est pas un mot de vous : c’est celui de vos adversaires, et plus encore de vos ennemis...Ce mot donc, communard, lancé tel un crachat, je ne l’emploierai pas".

Nous l’avons choisi pour rendre hommage à Jean-Baptiste Clément et à son livre : La revanche des Communeux , écrit en 1886 et que « Le bruit des autres » (éditeur de Limoges qui n’existe, hélas, plus aujourd’hui) a réédité en 2012.

Drapeau rouge ou drapeau noir ?

Le drapeau rouge est bien celui choisi par la Commune. Le drapeau tricolore, brandi par Versailles pour écraser la Commune, devient "la bannière flétrie des assassins" (expression utilisée par la Commission municipale du 12è arrondissement).
Le drapeau rouge a donc été choisi ensuite par le mouvement ouvrier jusqu’au début des années 1880.

Dès 1882, les anarchistes se prononcent pour l’abandon du drapeau rouge au profit du drapeau noir, justifiant ainsi ce choix : « Les événements, les faits de tous les jours, nous ont montré clairement que le drapeau rouge, si glorieux vaincu, pourrait bien, vainqueur, couvrir de ses plis flamboyants, les rêves ambitieux de quelques intrigants de bas étage. Puisqu’il a déjà abrité un gouvernement et servi d’étendard à une autorité constituée. C’est alors que nous avons compris qu’il ne pouvait plus être pour nous, les indisciplinés de tous les jours et les révoltés de toutes les heures, qu’un embarras ou qu’un leurre. ».

Louise Michel qui a déclaré : « J’arborerai le drapeau noir, portant le deuil de nos morts et de nos illusions », s’en empare le 9 mars 1883, à Paris, lors de la manifestation des sans-travail aux Invalides. Drapeau improvisé, à partir d’un vieux jupon noir fixé sur un manche à balai. Plus tard, lors d’un de ses procès, elle affirme : « Le drapeau noir, drapeau de la misère, plutôt que celui de la Commune, doit être considéré comme le symbole des ouvriers sans-travail. »

On peut aussi partager l’idée de Serge Pey :

"Nous avons un drapeau sans drapeau
Nous avons un drapeau qui n’aime pas les drapeaux
Nous avons un drapeau en feu
Qui brûle tous les drapeaux"

Louise Michel au Panthéon ?

Depuis le début des années 80, la figure de Louise Michel, militante anarchiste, a été intégrée au récit national. Au point qu’en 2014, elle a été élue héroïne de l’année par les lectrices de "Madame Figaro" ! La proposition de la faire entrer au Panthéon est l’apogée de ce processus. Car, comme l’écrit Ludivine Bantigny : "La distance dans le temps et l’espace émousse le tranchant des engagements et l’acuité même de l’Histoire...Quand c’est loin, tout est pardonné (et réapproprié). Quand c’est loin, les révolutions, c’est très bien."

Symbole d’une femme libre, rebelle à tout ce qui risquait d’entraver sa liberté, Louise Michel a fait l’objet d’appropriations diverses, souvent conflictuelles. Pour nous, celle qui a écrit : "Le pouvoir est maudit, c’est pour cela que je suis anarchiste" ne peut être enfermée au Panthéon. Ce serait une insulte à son engagement.
Mais évitons aussi d’en faire un mythe. Écoutons ce que dit Laurence De Cock, historienne : "Je ne suis pas favorable aux "romans de gauche" qui remplaceraient, par exemple, Jeanne d’Arc par Louise Michel. Au fond, la logique serait la même : l’héroïsation et l’élaboration d’une légende de gauche. C’est aussi une forme d’aliénation, et ça ne peut guère servir l’émancipation sociale"

Pour en finir avec les si...

« Si en septembre 1870 à la tête du prolétariat de France s’était trouvé le parti centralisé de l’action révolutionnaire, toute l’histoire de la France, et avec elle toute l’histoire de l’humanité, aurait pris une autre direction. » C’est Trotsky, en 1921, une préface. Ça me rappelle Pierre et le loup…Mais…que ce serait-il passé si petit Pierre n’avait pas attrapé le loup, bougonne le grand-père lorsque l’histoire est terminée…
Ils disent tous la même chose, tous ces stratèges, qui savent comment on fait une révolution... Oui, que ce serait-il passé ? Marx le dit et l’écrit au moins depuis le 6 avril, il aurait fallu marcher sur Versailles dès le 22 mars. D’ailleurs, le Comité Central en discutait dès le 18 mars. Rien n’était plus facile. Très peu de troupes défendaient Versailles. La supériorité numérique de Paris était considérable. La Garde nationale n’était pas bien organisée mais l’armée versaillaise ne l’était pas du tout. Les fédérés auraient conquis la ville... Oui, pendant plusieurs jours, le Comité central aurait pu prendre Versailles sans grande difficulté. Mais alors, que ce serait-il passé ? Le gouvernement et son Assemblée de ruraux auraient franc filé un peu plus loin…Vaincre l’Assemblée rurale et monarchiste de Versailles, peut-être, mais convaincre la France rurale et monarchiste ? La révolution sociale ? Dans tout le pays ? Dans un seul pays ?
…Et si Blanqui avait été là ? Et si la Commune avait occupé le Mont Valérien ? Et si on avait mieux tenu le Point-du-jour ? Ou repoussé les Versaillais lorsqu’ils sont entrés dans Paris ? Si on avait pu résister un mois de plus ?
…Les loups sont entrés dans Paris mais que ce serait-il passé si petit Pierre avait arrêté les loups ? Ici commence le conte.

Michèle Audin « Comme une rivière bleue »

Certes, les communard.es ont hésité, tâtonné, se sont parfois trompés. Mais la Commune, sans être un paradis (libertaire), a tenté, dans un contexte difficile de guerre civile, d’édifier un embryon de société auto-organisée, avec des mandats révocables à tout moment, la démocratie directe en action. Des décisions ont été prises dont certaines devront attendre bien longtemps avant d’être confirmées par les gouvernements suivants. Donc cessons de refaire l’Histoire avec des si...

« Ces hommes et ces femmes se sont dressés contre ce qui leur était inacceptable ; se sont organisée eux-mêmes, souverainement, au sens le plus fort de ce terme. Ils ont mené leurs luttes, à nous de mener les nôtres. »
Eric Fournier « La Commune n’est pas morte » 2013