"Hacking Jusrice" 16 décembre au Lido à 20h30 Ciné-débat avec Daniel Mermet
Article mis en ligne le 3 décembre 2021

par Webmestre

Un film de Clara López Rubio et Juan Pancorbo

Allemagne, Espagne 2021 90 minutes Les Mutins de Pangée

Le film, qui a pris neuf années de tournage, évoque la défense juridique du fondateur de Wikileaks. Il suit les tourments juridiques subis par le journaliste dans l’affaire suédoise (abandonnée en 2017), puis son lâchage par le président équatorien Lenin Moreno en 2019 ainsi que les poursuites américaines demandant son extradition qui se perpétuent encore aujourd’hui.

Si le film, distribué courageusement par Les Mutins de Pangée, est finalement sorti cette année, Assange, lui, est loin d’être tiré d’affaire. Son extradition a été suspendue, mais une nouvelle décision dans les jours à venir est attendue avec angoisse…

Qui est Julian Assange ?

Fidèle au principe Cypherpunk « vie privée pour les plus faibles, transparence pour les puissants », Julian Assange a créé WikiLeaks en 2006, outil de publication crypté qui a permis la fuite de millions de documents classifiés ou secrets, mettant au jour les pratiques des gouvernements et des multinationales concernant la guerre, l’espionnage et la corruption.

Les fuites transmises à WikiLeaks en 2010 par l’analyste de l’US Army Chelsea Manning constituent les révélations les plus importantes de l’histoire sur les crimes de guerres et les mensonges des États-Unis. Julian Assange est alors devenu une cible et une campagne de propagande a été menée pour la « destruction de son image ». Réfugié dans l’ambassade équatorienne à Londres, il a été espionné ainsi que ses avocats, ses visiteurs et ses défenseurs. Il est désormais confirmé que la CIA avait aussi envisagé de l’assassiner ou de le kidnapper, avant de finalement obtenir son enlèvement par la police britannique au sein même de l’ambassade, le 11 avril 2019. Aujourd’hui, il est incarcéré dans la prison de haute sécurité de Belmarsh en attente de son extradition. Sa santé s’est beaucoup détériorée. Selon le rapporteur de l’ONU sur la torture, il a été « délibérément exposé, pendant plusieurs années, à des formes graves de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ». Poursuivi pour espionnage et piratage informatique au nom de l’Espionage Act de 1917 (créé pour museler les pacifistes, socialistes, anarchistes et syndicalistes), il risque 175 ans de prison aux Etats-Unis.

John Shipton (le père de Julian Assange) et Stella Moris (son avocate et compagne) ont rencontré à l’Assemblée nationale, en novembre dernier, les 39 premiers députés de divers courants qui demandent l’asile politique en France pour le fondateur de WikiLeaks.

Daniel Mermet a réalisé un entretien avec John Shipton à voir sur la-bas.org, dans lequel le père de Julian Assange fait remarquer le nombre de services qu’a rendu son fils à la France en révélant comment les téléphones portables des présidents de la République Chirac, Sarkozy, Hollande, avaient été espionnés par les États-Unis et comment ces “alliés” ont espionné la BCE (Banque Economique Européenne) dans le but de dépouiller l’Europe…
Avec WikiLeaks, Assange a aussi révélé comment les États-Unis ont espionné toutes les négociations des entreprises françaises sur les gros marchés internationaux, ce qui annonçait notamment l’affaire de la trahison du marché des sous-marins australiens. Pour toutes ces raisons déjà, Assange devrait trouver asile en France et être décoré pour services rendus à la nation.

L’affaire Assange est l’affaire de tous. De son sacrifice naîtra une nouvelle situation qui concerne toute dissidence, tout activisme mais aussi l’avenir de la liberté de la presse. Car si le journaliste et éditeur Julian Assange est considéré comme espion pour avoir juste fait le travail que tout journaliste se doit de faire, l’avenir sera d’autant plus compliqué pour informer des vérités de ce monde, sur les crimes de guerres, les paradis fiscaux, le harcèlement des dissidents, la destruction écologique de la planète, les tricheries électorales...

Le point de vue de Serge Halimi sur l’affaire Assange

« Un journaliste occidental doit d’abord combattre les ennemis de l’Occident…Or à cette aune-là, un dissident russe, chinois, cubain compte infiniment plus qu’une personne torturée en Egypte ou à Dubaï, arbitrairement torturée à Guantanamo ou nommée…Julian Assange. Les secrets des « pays démocratiques », même lorsqu’ils concernent les pires vilenies, bénéficient d’un régime de faveur qui sera (légitimement) refusé aux « régimes totalitaires ». Exposer les premiers vaut d’être qualifié de « cyber terroriste » ou d’espion tandis que divulguer les seconds élève au rang de lanceur d’alerte et de héros de la liberté de la presse…Julian Assange est tombé du mauvais côté de la nouvelle guerre froide. »