18 mars Lido 20h Soirée Moyens Métrages animée par Anne Steiner, historienne et Vincent Pouplard, cinéaste
Article mis en ligne le 28 février 2022

par Webmestre

1 « Zéro de conduite » de Jean Vigo
France 1933 Fiction 50 minutes
Scénario et montage : Jean Vigo
Musique Maurice Jaubert
Avec : Jean Dasté, Louis Lefebvre, Gilbert Pruchon, Gérard de Bédarieux, Delphin…

Présentation par Joël Magny :
« Zéro de conduite est devenu un film mythique, plus souvent connu que réellement vu. Bien sûr, la personnalité de Vigo, mort à vingt-quatre ans après quatre films, y est pour quelque chose, sans oublier le fait que ce jeune cinéaste turbulent, inflexible et novateur est le fils d’un anarchiste “suicidé” en prison (Miguel Almereyda) alors que Jean Vigo n’avait que douze ans...
Mais plus encore le destin de Zéro de conduite entoure le film d’une aura qui en recouvre les valeurs propres. En 1933, Zéro de conduite fut totalement interdit pour “dénigrement de l’instruction publique” et esprit “anti-français”. Non seulement c’est un phénomène exceptionnel, mais la durée de l’interdiction ne l’est pas moins : le film ne sera “libéré” qu’à la Libération »

Un point de vue sur le film :
« Interdit de sortie tel un mauvais élève, Zéro de conduite n’obtint son visa qu’en 1945 pour faire un carton plein ! Fourmillant de trouvailles, de séquences jubilatoires, de trucages visuels et sonores, le film est impertinent, révolté et insolent. C’est un chahut permanent, une guerre, une évasion. Une œuvre drôle et anticonformiste, à (re)découvrir absolument ! »

Points de vue sur Jean Vigo :
« Tous les cinéastes cherchent le cinéma et le découvrent partiellement Vigo est le cinéma incarné. A voir ses films, on se rend compte qu’il est beaucoup plus qu’un metteur en scène, qu’il n’explore pas une terre étrangère. Il y est né. C’est pourquoi il fait des films comme on respire. Il voit, il rêve, il pense, il écrit, il vit cinéma…
Si le cinéma est un art du sommeil, il n’y a qu’un homme qui ait la clé des songes : Jean Vigo » Henri Langlois Trois cents ans de cinéma

« Il ne se bornait pas à revendiquer la liberté. Par son travail, il réalisait concrètement sa revendication, à la différence des faux révolutionnaires, surréalistes ou extrémistes, il n’exprimait pas la révolte, il la « réalisait ». Vigo était un anarchiste conséquent » Glauco Viazzi, critique de cinéma italien 1960

Présentation d’Anne Steiner :
Sociologue et historienne, elle a travaillé sur la violence politique dans les années 1970 avant de consacrer plusieurs ouvrages au mouvement anarchiste et aux grèves émeutières à la Belle Époque. Son dernier ouvrage, "Révolutionnaire et dandy, Vigo dit Almereyda" est une biographie politique d’Eugène Bonaventure Vigo, dit Almereyda, père du cinéaste Jean Vigo.

2 « Pas comme des loups » de Vincent Pouplard
France 2016 Documentaire 59 minutes
Grand Prix aux Écrans documentaires d’Arcueil 2016
Festival Traces de vies, Clermont-Ferrand – Prix Regard Social, 2016

Synopsis
Roman et Sifredi ont à peine 20 ans. Ils sont en mouvement, comme leur identité, entre exclusion et marginalité. Dans des lieux secrets, souterrains, squats, lisières de bois, sous des ciels nuageux ou des néons à faible tension, ils inventent leur vie, leur langage et leurs codes.

Présentation par Vincent Pouplard :

« Apaches » d’un jour, « blousons noirs » dans la nuit, « voyous » toujours, ces « hommes infâmes » qui intéressaient tant le philosophe Michel Foucault inspirent souvent une certaine peur, de la crainte et du rejet. Visages floutés, voix transformées, corps absents. La figure médiatique du délinquant est depuis plus d’une décennie de plus en plus absente ou caricaturale.
Avec ce film, il y a le désir de donner un autre visage à ceux que l’on nomme « bandits », « voyous », « délinquants » comme si ces qualificatifs avaient la moindre valeur identitaire. Je voulais qu’ils retrouvent corps, voix et pensées.
Quand j’ai rencontré Roman et Sifredi dans le cadre d’un atelier que j’animais, j’ai eu envie de prolonger cette rencontre et d’élaborer avec eux ce qui est devenu ce film. Il s’agissait pour moi d’ouvrir une porte, de rendre accessible une rencontre avec des jeunes « hors la loi » parfois, mais avant tout hors-normes.
Il n’y a pas de jeunesse ennemie, pas de « solution » carcérale à la délinquance des mineurs. Les maux se traitent avec patience...
La nécessité de ce film émerge dans un contexte de désertion progressive de l’État quant au soutien aux actions de prévention, la fuite par la criminalisation de la misère sociale, la posture de la sourde oreille et de la règle sans appel. L’ordonnance de 1945 posait le caractère exceptionnel de l’incarcération pour un mineur délinquant et la nécessaire primauté d’un travail d’insertion sur la punition carcérale ...

Un avis :
« Ce film nous emmène dans un monde d’après où des survivants réinventent joyeusement une manière de vivre, d’être ensemble, de parler, de résister, à partir des débris de ce qu’il faut bien nommer notre société. Il fallait encore le faire avec les moyens du cinéma : ici, ce sont la justesse d’un cadre et d’une relation, la proposition d’un jeu, un jeu très sérieux,
auquel les personnages se prêtent, et nous convient. »
(Les Écrans documentaires d’Arcueil)

Présentation Vincent Pouplard :
Né en France en 1980, Vincent Pouplard habite à Nantes où il travaille en tant que réalisateur et intervenant cinéma dans le cadre d’ateliers. Après des études de sociologie et de photographie, il réalise des performances mêlant musique et images puis en 2010, son premier film documentaire Le Silence de la Carpe