Documentaire 52mn France 1994
"Durant l’année 1871, éclate en Algérie l’une des plus grandes insurrections après la chute de l’émir Abdelkader. Comme pour la commune de Paris, cette révolte sera vaincue, et les survivants, Kabyles et Communards, déportés vers la Nouvelle-Calédonie. Lorsqu’en 1879 l’amnistie des communards est proclamée, les déportés kabyles en sont exclus ; obligation leur est faite de résider sur le territoire calédonien. L’amnistie tant attendue n’intervient que le 1er février 1895, mais il faut attendre 1904 pour que soit levée l’obligation de résidence.
Plus d’un siècle après cet évènement, "Kabyles du Pacifique" reconstitue le périple de ces déportés ayant fait souche dans le Pacifique. Ce film, où les personnages d’aujourd’hui s’expriment en français, en arabe, en Kabyle et dans la langue des kanaks de l’île des Pins, a été tourné à travers trois continents. Cette histoire croise le destin de trois peuples (les Algériens, les Communards et les Kanaks) et cela jusqu’à nos jours."
Mehdi Lallaoui est réalisateur et écrivain. Il est, avec Samia Messaoudi et Benjamin Stora, co-fondateur depuis 1990, de l’association Au Nom de la Mémoire. Celle-ci est axée autour de trois thèmes qui s’entrecroisent : les mémoires ouvrières liées souvent à l’immigration, les mémoires urbaines, et en particulier la banlieue, et enfin les mémoires issues de la colonisation. Depuis 2001, il a participé à de nombreuses actions de Mémoire à Vif.
60ème anniversaire du 17 octobre 1961
"Mais c’est aussi le trentième anniversaire de la fin d’un silence de trente ans. De 1961 à 1991, ce pogrom qui eut lieu en plein Paris, au vu et au su de tous, fut passé sous silence malgré quelques courageuses publications. Oui, trente ans d’omerta. Quiconque interrogeait ou voulait témoigner s’entendait répondre : « si c’était vrai, ça se saurait ».
En 1991, enfin, La Bataille de Paris, le livre de Jean-Luc Einaudi, a été un évènement important dans la prise de conscience de ce massacre. Films, articles, débats ont marqué alors la fin de ce silence. Sur France Inter, fin 1991, Là-bas si j’y suis diffusait une suite de reportages qui ont contribué à révéler ce crime d’État au grand public. Aujourd’hui, ces documents résonnent particulièrement. La haine raciale que l’extrême droite exacerbe avec succès ces temps-ci en France a exactement la même racine que la haine qui a tué, torturé et noyé des quantités d’Algériens cette nuit-là."
Daniel Mermet
Une journée donc longtemps portée disparue, où la manifestation pacifique des Algériens à Paris contre le couvre-feu discriminatoire imposé a été violemment réprimée : plus de 200 manifestants massacrés, « la répression d’Etat la plus meurtrière qu’ait jamais subie une manifestation de rue désarmée ». On attend toujours que cet événement sanglant soit reconnu comme un crime d’Etat.
Lecture de textes sur ce moment douloureux de notre histoire.
Le silence autour de ce massacre peut s’expliquer par :
– la censure très forte : 13 livres saisis en 1961, touchant essentiellement les éditions de Minuit et Maspero.
– la falsification puis la destruction des documents et dossiers, rendant très difficile le travail des historiens.
– la frilosité du PC qui n’a apporté qu’un soutien mitigé au FLN durant la durée du conflit et son immobilisme face au 17 octobre. Ses appels à manifester seront plutôt au nom des dangers du racisme et du fascisme. Et la mémoire de Charonne (février 62) a recouvert celle du 17 octobre.
– En Algérie, il n’y eut pas non plus de reconnaissance réelle avant 1988. Sans doute parce que la Fédération de France du FLN qui avait appelé à la manifestation était mal vue par le FLN (trop de Français et de « jupons » ! à la Fédération de France).
Il y eut cependant des réactions immédiates mais dénonciations et soutiens sont plutôt du côté de l’UNEF et de la JEC qui organisent, dans les jours qui suivent, des rencontres et manifestations.
« Ratonnades à Paris » de Paulette Péju, avec les photos d’Elie Kagan, est édité par Maspero en novembre 1961 mais le livre est saisi chez l’imprimeur. Il ne sera réédité qu’en octobre 2000.
Jacques Panigel réalise « Octobre à Paris » qui, dès sa sortie en 1962, est interdit jusqu’en 1973, après une grève de la faim de 31 jours de René Vautier. Il ne sortira véritablement sur les écrans qu’en 2011.