Présentation/Débat : Jean-Baptiste Thoret qui signera, à l’issue de la projection, son livre sur Carpenter : "Back to the Bone"

Soirée organisée par Ciné Bambule et la Cinémathèque de Nouvelle-Aquitaine

Librairie partenaire : Les Oiseaux Livres de St Yrieix-La-Perche

1988 USA 94 mn couleur/Noir et Blanc VOSTF copie restaurée

Avec : Roddy Piper, Keith David, Meg Foster, George ’Buck’ Flower, Peter Jason, Raymond St. Jacques, Susan Blanchard, Norman Alden…

Scénario  : John Carpenter, d’après la nouvelle de Ray Faraday Nelson

Musique : John Carpenter

Synopsis : John Nada, chômeur, arrive à Los Angeles où il est embauché sur un chantier. Il rencontre Frank Armitage et va loger avec lui dans un bidonville. John va y découvrir une paire de lunettes hors du commun qui permettent de voir le monde tel qu’il est réellement, à savoir gouverné par des extra-terrestres ayant l’apparence d’humains et maintenant ces derniers dans un état apathique au moyen d’une propagande subliminale omniprésente.

Voir est un sport de combat par Jean-Baptiste Thoret :

« Soit un problème qui concerne tout le monde, en particulier les spectateurs de cinéma : il y a ceux qui voient, puis ceux qui regardent…Les yeux servent à regarder mais pas à voir, écrivait le grand Dino Risi…La qualité héroïque que Nada acquiert au fil des événements se construit exclusivement à partir de son désir de voir, lequel tranche avec la passivité, l’indifférence, voire l’apathie des autres habitants du campement, qui préfèrent garder les yeux rivés sur la télévision et ignorer ce qui se passe autour d’eux. Résister, c’est commencer par ouvrir les yeux et apprendre à regarder en face une réalité dans toutes ses dimensions, visibles-invisibles…

Mais pour des cerveaux colonisés par les clichés et les couleurs du faux, pour des esprits intégralement conquis par le régime d’images publicitaires qui fonde notre société d’hyperconsommation, cette opération requiert sinon un acte héroïque en tous cas une forme de lucidité active dont peu d’individus peuvent se prévaloir. Elle requiert surtout -c’est l’hypothèse du film- un détour par la fantaisie, un coup de force fantastique pour dé anesthésier les regards…

Dans They live, Carpenter ne se contente pas d’incarner les forces du capital, il les affuble d’un visage disgracieux et risible, qui suscite moins la crainte que la raillerie. Lorsque j’avais découvert le film, j’avais été décontenancé par son humeur légère…Je n’avais pas compris que l’intelligence politique du film tenait moins dans le dévoilement d’une réalité cachée et de la peur que cette réalité aurait dû susciter que dans la façon dont Carpenter tournait en dérision les extraterrestres en moquant leur look carnavalesque, leur esprit de sérieux, leurs codes mondains et leur novlangue, qui en réalité sont aussi les nôtres…L’effroi empêche de simplement voir les choses et rend tout dialogue impossible. Il prive celui qui perçoit-ou celui qui ne veut pas voir, ce qui revient au même-de sa capacité de riposte…Carpenter fait donc coup double puisque, dans le même mouvement, il désigne un problème sérieux (les ressorts du capitalisme des années 80) et procure les armes pour le combattre. »